La rubrique «Lumière sur…» constitue une série d’articles un peu particulière, pour parler d’un auteur que j’aime bien, en général pas très connu, avec un peu d’histoire sur son passé, son présent, son futur.
Aujourd’hui, j’aimerais parler d’un groupe bien de chez nous (Montpellier pour être exact), le nom ne vous dit probablement rien et pourtant vous les avez sûrement déjà entendus (vous allez comprendre), leur style a pas mal changé au cours des années, mais j’apprécie toujours autant ce qu’ils font. Ils sont la terreur des gens avec un clavier sans caractères spéciaux…
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« Rino c’est quoi ? »
« rinôçérôse » (à ne pas confondre avec l’animal) est un projet assez… atypique formé en 1997 (à titre de comparaison, Homework, le premier album des Daft Punk, est sorti en 1997 aussi) et mené par Jean-Philippe Freu et Patrice Carrié (Patrice, c’est une femme, au passage), rejoints occasionnellement par d’autres comme Florian Brinker.
Atypique d’abord car ce sont deux psychologues (!) de formation, et ensuite parce qu’il est assez dur de ranger leur musique dans un genre en particulier ; rock, pop, électro… Selon le morceau ou l’album, l’étiquette qu’on aimerait leur coller change sans arrêt. On va donc dire qu’ils sont dans la fameuse mouvance « french touch« , cette bande de groupes, français pour la plupart, sur lesquels il est plus ou moins dur de mettre un genre en particulier. Atypique, on vous dit…
Pour la petite histoire, leur nom provient du nom des tableaux de Gaston Duf, un peintre d’art brut jugé fou qui a fini interné en 1940 (vous voyez, maintenant, le lien avec le fait qu’ils soient psychologues ?), dont plusieurs tableaux comportaient le mot « rhinocéros » dans leur nom, mais toujours écrit de manière différente… « rinôçérôse » en fait partie.
Les débuts
Si leur style est appelé à évoluer, les débuts de Rinôçérôse sont résolument électro.
Retrospective sort donc en 1997 (oui, drôle de nom pour un premier album…). Bien que ce soit le premier (et que beaucoup considèrent qu’il s’agit d’un album expérimental), il y a du bon, surtout pour se reposer : l’album est avant tout composé de musique plutôt calme. Déjà, la guitare est présente un peu partout, mais les rythmes restent simples et doux, sans paroles ; un parfait album pour chillout. Avec des morceaux comme Pacific Motion ou, ci-dessous, Machine Pour Les Oreilles:
En 1999 (deux ans plus tard), le groupe poursuit sur sa lancée avec Installation Sonore, un album où, déjà, l’orientation rock commence à davantage se manifester. Il est souvent considéré comme le premier « vrai album » du groupe.
Si on reste globalement dans l’ambiance « chill-out » de Retrospective, qui perdure sur des morceaux comme Mes Vacances à Rio ou 323 Secondes de Musique Répétitive, des morceaux plus « rock » comme Le Mobilier annoncent la transformation que le groupe est en train d’amorcer. De manière générale, l’album a un rythme un peu plus rapide et l’instrumentation devient un peu plus riche (notamment avec la flûte et autres vents).
Music Kills Me (2002)
On peut dire que l’album Music Kills Me, sorti en 2002, est un grand tournant pour le groupe. C’est là que le projet Rinôçérôse devient « sérieux » (entre guillemets): avec l’apparition de morceaux vocaux (Music Kills Me, Lost Love entre autres), clip vidéo (pour le morceau éponyme)… C’est un projet charnière après lequel « plus rien ne sera jamais pareil ». 🙂
Côté musique, l’instrumentation est globalement uniforme tout au long de l’album, les rythmes électroniques des synthés sont plus souvent couplés à des percussions type djembé, flûte et guitare acoustique qu’à la guitare électrique et la batterie, mis à part quelques morceaux résolument plus rock (comme Le Rock Summer ou Music Kills Me). Certains morceaux plus calmes comme Dead Can Dance ou Highway To Heaven ne sont pas sans rappeler l’ambiance tranquillou des premiers albums. C’est d’ailleurs une drôle d’approche quand on sait que, comme le titre de l’album et de certains morceaux le suggèrent, le thème principal de l’album est la mort. Mais une mort… cool, relax.
En résumé, Music Kills Me est un mélange savamment dosé entre ce que le groupe quitte (la sonorité un peu relax des rythmes lents avec beaucoup d’instruments acoustiques) et ce qu’il commence à adopter (un son rock, puissant et au tempo élevé), si bien qu’encore aujourd’hui, beaucoup de fans considèrent qu’il s’agit du meilleur…
L’inénarrable clip vidéo de Music Kills Me (un concours de air guitar) :
Clip – Rinocerose – Music kills me from Jerome PY – Director on Vimeo.
Ces derniers temps
On entre donc après cet album dans la période « actuelle » du groupe: plus vraiment instrumental, et plus vraiment relax, le son qu’ils adoptent devient beaucoup plus pop-rock électrique et « saturé », et se dote maintenant d’un chanteur sur pratiquement tous les morceaux.
Il y a d’abord Schizophonia en 2006. On entre là en totale rupture avec le style de ce qu’a fait le groupe précédemment (des bandes-son relax, un peu rock mais pas trop). La guitare est saturée, la voix est gueularde, le rythme est vif. Dans une avalanche de featurings, avec des chanteurs qui sont (ou deviendront) pour certains des habitués: Florian Brinker, Mark Gardener (ex-Ride), l’improbable Jessie Chaton (du groupe déjanté Fancy)…
C’est notamment à cette période que vous en avez sûrement entendu un morceau: en effet, Apple a sélectionné leur titre Cubicle comme bande-son d’une pub pour l’iPod :
(faites la comparaison avec Machine pour les Oreilles un peu plus haut, le changement de style est frappant)
En 2009, le groupe réitère avec Futurinô.
Là où la transition était plutôt violente entre Music Kills Me et Schizophonia, le groupe revient ici un peu « aux sources », tout en rappelant quelques amis de Schizophonia (Mark Gardener, Jessie Chaton…).
Le temps de quelques titres, on se croirait revenu à l’époque Music Kills Me avec des morceaux comme Mind City (un instrumental !) ou le très doux Weekend of Sin (en fin d’album, qui n’est pas sans rappeler le Highway To Heaven sur Music Kills Me). À part ça, c’est toujours aussi énervé, Jessie Chaton s’éclate sur Touch Me et My Cadillac, certains morceaux semblent même taillés pour le dancefloor, comme Where You From (avec Mark Gardener) ou Time Machine avec la chanteuse Ninja.
Ce dernier a beaucoup fait parler de lui car il s’agit un peu du seul morceau où les guitares laissent la part belle aux synthétiseurs. Étant le seul morceau à bénéficier d’un vidéoclip, c’est aussi celui qui a été mis en avant sur cet album, et même s’il a rencontré un certain succès, il a été décrié car il n’est, de par l’absence des guitares, pas très représentatif ni du reste de l’album, ni de la musique de rinôçérôse en général.
Rinocerose Featuring Ninja – Time Machine from Go! TV on Vimeo.
Donc au final, Futurinô est, un peu à la manière de Music Kills Me en son temps, un mélange entre le passé et le futur du groupe. Et une fois de plus c’est un mélange qui passe plutôt bien ! (Bien mieux que Schizophonia, à mes oreilles) Je pense que ma préférée est Panic Attack 🙂
Le futur(inô, ha ha)
Récemment, le groupe a sorti un EP, Angels & Demons, et un single, Medicine, qui promet d’être une machine de guerre en live, tous les deux dans la même sonorité que Futurinô. On y retrouve à la voix Bnann, qui a déjà chanté sur Cubicle (Schizophonia) ou Head Like a Volcano (Futurinô). Pour moi, cela ne laisse présager que du bon pour le futur du groupe, et qui sait, bientôt un nouvel album ? 😀
Attention, sans être vraiment choquant (je trouve que esthétiquement il est très réussi), le clip de Medicine est définitivement Not Safe For Work (ne le regardez pas au boulot):
Dans le même genre
Comme dit au début de l’article, je pense qu’on peut classer sans risque de se tromper Rinôçérôse dans la case « french touch ». Alors, sans surprise, si vous aimez Rinôçérôse, vous aimerez probablement les groupes suivants, eux aussi français :
- Air
- Cassius
- Phoenix
- Daft Punk
Bon bah voilà, c’est fini…
J’espère que cet article vous aura donné envie d’en savoir plus sur ce groupe un peu spécial de la french touch qu’est Rinôçérôse. 🙂
D’ailleurs, je vous dirais bien que le meilleur moyen de soutenir un artiste, c’est d’aller le voir en concert, mais bien que français, inutile d’espérer aller les voir bientôt, le groupe est bien plus un habitué de l’étranger, comme l’Espagne ou l’Amérique du Sud, et ne passe que très rarement (jamais ?) en concert en France. Donc, pensez-y la prochaine fois que vous vous faites une virée en Espagne, vous aurez peut-être de la chance…
C’est terminé pour cette fois !