Rediff’ – « Des milliards de tapis de cheveux » d’Andreas Eschbach

Des milliards de tapis de cheveux est un roman de science-fiction composé de dix-sept histoires courtes (plus un épilogue) prenant toutes place dans le même univers, un peu à la façon des séries classiques de SF comme Les Robots d’Asimov, par exemple.

Le concept original des tapis en cheveux, mis en évidence dans le titre, est ce qui m’a donné envie de lire ce livre.

La base de l’intrigue est plutôt simple : on nous présente comment, sur une planète rurale, des tisseurs de tapis en cheveux passent leur vie à concevoir leur ouvrage, utilisant exclusivement les cheveux de leurs femmes, concubines, et filles.

Les tisseurs ne peuvent avoir qu’un seul fils, qui obligatoirement leur succédera en tant que tisseur à leur tour. Tout cela afin d’acheminer les précieux tapis au Palais des Étoiles, la demeure de l’Empereur qui règne sur la galaxie depuis des temps immémoriaux.

Mais les choses se gâtent lorsque la rumeur commence à courir que l’Empire n’existe plus, et que l’Empereur serait mort…

Bien loin des romans d’aventures spatiales, les dix-sept histoires en reprennent le ton même si la nature de leur sujet est bien différente. Des milliards de tapis de cheveux est un roman qui interroge au sujet des croyances tenaces, du culte de la personnalité, de la force des dogmes millénaires, et de l’incapacité des Hommes à entrevoir le futur lorsqu’ « il en a toujours été ainsi ».

L’auteur arrive ici à présenter toute une galerie de personnages aux histoires et motivations très diverses, égrenant jusqu’à la fin des indices sur la véritable nature et l’objectif de la production des tapis en cheveux. Chaque récit suit un personnage différent, et il faudra attendre le dénouement final pour comprendre avec certitude comment ces histoires, en apparence sans rapport, sont liées les unes aux autres. Il est assez jouissif de constater comment l’auteur arrive à leur insuffler à chacun-e leur caractère propre, grâce à un choix soigné de vocabulaire et des dialogues bien écrits (et probablement bien traduits en français).

Mais il faut savoir que, des dix-sept histoires que compte le livre, la moitié environ n’ont qu’un rapport très ténu avec les tapis du titre. C’est dommage, car de façon générale, j’ai trouvé que celles traitant des tapis revêtent le plus d’intérêt, probablement car elles ont été les plus travaillées.

Les autres donnent un peu la sensation de meubler, donnant à l’auteur une chance de construire son univers, tout en présentant certains personnages que l’on recroisera dans d’autres histoires. Si certaines recèlent de vraies bonnes idées intéressantes, d’autres paraîtront sans doute éculées et peu originales pour qui lit de la SF en 2025. C’est donc un bilan un peu mitigé.

De plus, il m’a semblé qu’à cause de ce procédé, l’auteur s’est senti obligé, à chaque fois qu’il est de nouveau question des tapis en cheveux, de nous réexpliquer ce qu’ils sont, comment ils sont produits, et à quelles fins. Ce qui devient un peu redondant, à la longue.

Je n’ai pas particulièrement apprécié la façon dont les femmes sont traitées dans cet univers, dans des sociétés quasi-tribales et patriarcales à l’extrême, ou voire même en tant que « trophée » que deux hommes se disputeraient dans une compétition sportive. Cela a du sens dans l’univers de l’auteur, mais une chose est sûre, « Des milliards de tapis de cheveux » n’a pas été le roman féministe de l’année 1995.

En conclusion, une histoire racontée intelligemment au travers d’une multitude de personnages très variés, bénéficiant d’une trame narrative principale plutôt intéressante, mais parfois desservie par des récits annexes à l’intérêt variable. Je ne regrette pas ma lecture, mais ça ne m’a pas donné envie de replonger dans cet univers plus que ça (il semble y avoir eu des suites).

(Initialement publié sur Babelio)

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